Résumé de la Critique de la Raison pure (page 6)
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En fait, le mathématicien raisonne plutôt sur le concept a priori du cercle, et les lois formelles qui régissent les différentes figures mathématiques : il trouva qu’il ne devait pas suivre ce qu’il voyait sur la figure, ni même le simple concept de celle-ci, […] mais qu’il lui fallait produire cette figure par l’intermédiaire de ce qu’il y pensait et présentait lui-même a priori d’après des concepts
1.
Avec les mathématiques, comme la logique, on voit apparaître un nouveau type de connaissance.
On a spontanément en effet l’idée que la connaissance est toujours empirique. C’est-à-dire l’idée que pour apprendre, il faut faire l’expérience du monde extérieur.
Or la logique ou les mathématiques nous montre qu’il existe un autre type de connaissance : la connaissance a priori. Celle-ci se porte non pas sur le monde extérieur, mais sur les concepts et lois a priori de notre entendement.
Mais la physique ? Celle-ci semble reposer sur l’expérience du monde extérieur. N’est-elle pas la science empirique par excellence ?
En fait, elle aussi repose au moins en partie sur des concepts a priori.
Les physiciens, loin de se complaire dans une observation passive de ce que la nature veut bien leur révéler, organisent des expériences. Kant prend le fameux exemple de Galilée, qui fait rouler ses boules jusqu’au bas d’un plan incliné avec une pesanteur choisie par lui-même
, mais évoque aussi les expériences de Stahl ou de Torricelli.
Cela a provoqué une illumination pour tous les physiciens
:
Ils comprirent que la raison ne voit que ce qu’elle produit elle-même selon son projet, qu’elle devrait prendre les devants avec les principes qui régissent ses jugements d’après des lois constantes, et forcer la nature à répondre à ses questions, mais non pas se laisser guider uniquement par elle, pour ainsi dire, à la laisse.
Autrement dit, les physiciens ont compris l’intérêt de la connaissance a priori : il s’agit non pas de cesser d’utiliser l’expérience, mais d’utiliser les concepts et lois a priori de l’entendement pour organiser l’expérience et en tirer des résultats utiles :
La raison doit s’adresser à la nature en tenant d’une main ses principes […] et de l’autre main l’expérimentation qu’elle a conçue d’après ces principes, certes pour recevoir les enseignements de cette nature, non pas toutefois à la façon d’un écolier qui se laisse dire tout ce que veut le maître, mais comme un juge dans l’exercice de ses fonctions, qui force les témoins à répondre aux questions qu’il leur soumet.
C’est ce qui a fait que la physique est devenue une science, alors qu’auparavant, elle était un simple tâtonnement
empirique.
Ce passage permet d’éclairer une apparente contradiction : pourquoi Kant condamne-t-il la métaphysique, du fait qu’elle ne repose que sur des concepts a priori, alors qu’il considère les résultats des mathématiques et de la logique, qui elles aussi sont dans le même cas, comme des lois nécessaires et vraies ?
Pourquoi dit-il dans l’Introduction que c’est dans l’a priori que l’on trouve des lois universelles, tandis que dans le début de la Préface l’a priori est assimilé à la métaphysique et au savoir illusoire ?
Pourquoi y a-t-il une connaissance a priori valide chez Kant ?
Nous verrons plus tard quelle réponse on peut apporter à ce problème, fondamental.
Il nous faut poursuivre notre lecture, pour continuer à entrer en profondeur dans la pensée kantienne.
Retenons pour le moment qu’il existe pour Kant des connaissances a priori valides, telles que les mathématiques, la logique, la physique. On pourrait dire que la scientificité d’une discipline réside précisément dans la part d’a priori qui règne en elle. L’expérience seule, de son côté ne suffit pas en effet, pour fonder ce caractère scientifique.
Pourquoi ? Parce que, ainsi qu’on l’a vu dans l’Introduction, seuls les jugements a priori sont nécessaires et universels. Les jugements empiriques (de type : les cygnes sont blancs) peuvent être toujours invalidés par une nouvelle expérience qui va contredire les précédentes (la découverte d’un cygne noir).
1 Les références des citations sont disponibles dans l'ouvrage Kant : lecture suivie