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photo de Claudine Sagaert

Claudine Sagaert

Nîmes

Nous découvrons ici le parcours de Claudine Sagaert, docteure en sociologie et enseignante en philosophie

Etudes, lectures, projets... Voici son témoignage !


Pouvez-vous vous présenter ? Que faites-vous actuellement ?

J’enseigne la philosophie notamment aux étudiants du Diplôme National des Métiers d'Art et du Design à Nîmes. Dans mes cours, j’essaie de transmettre le plaisir de questionner, de clarifier, de comprendre mais aussi de nourrir la réflexion par la lecture des œuvres philosophiques et anthropologiques. Cette démarche est au cœur de mes recherches scientifiques qui portent principalement sur des problématiques liées à la représentation du corps. Membre de l’équipe « corps, genre, santé », du laboratoire Babel de l’université de Toulon, je participe à des colloques nationaux et internationaux ainsi qu’à  l’écriture d’articles et d’ouvrages.

Outre la philosophie et l’anthropologie, je me nourris de voyages, de découvertes de travaux artistiques ainsi que de la lecture d’œuvres littéraires. Ayant eu la chance d’enseigner la philosophie durant six ans au Brésil,  la rencontre d’autres cultures est pour moi importante car elle participe à un décentrement qui enrichit la manière de voir et de penser.

Quel souvenir gardez-vous de vos études ? De vos professeurs ? 

Trois professeurs m’ont particulièrement marqué.  Tout d’abord, Jean-François Mattéi au travers de son magistral cours sur Platon. Puis, Isabelle Koch pour la luminosité et la richesse de ses dissertations dans ses cours de préparation au CAPES et à l’Agrégation de philosophie. En dernier lieu mais le plus important pour moi, David Le Breton qui a été mon directeur de thèse. Bien avant d’avoir la chance d’être son étudiante, je l’ai rencontré, d’abord au travers de ses ouvrages et notamment de celui intitulé Des Visages. Puis lors de mon doctorat, David Le Breton m’a guidée dans mes recherches avec une grande générosité intellectuelle et humaine, me communiquant ainsi par-delà la richesse de ses analyses et de ses sources, le souci d’une grande rigueur dans les travaux scientifiques. 

Quel est le livre de philosophie qui vous a particulièrement passionné ? L'auteur pour qui vous avez eu un véritable coup de foudre ? 

A 15 ans une amie m’a offert la République de Platon, ce livre a inauguré mon entrée en philosophie. J’ai ensuite lu d’autres auteurs comme Kierkegaard et Sartre. C’est je crois la difficulté à comprendre les problèmes existentiels qui m’a conduite à interroger les philosophes. Mais le réel coup de foudre a été Hannah Arendt, la lecture de La Condition de l’homme moderne, puis celle de ses écrits politiques et notamment ses trois ouvrages relatifs aux Origines du totalitarisme. J’ai travaillé son œuvre à partir de la question des limites du politique, lors de mon mémoire de maîtrise.

Outre Hannah Arendt, Nietzsche et Michel Foucault, ont été déterminants. Tous deux, invitent à penser autrement, à faire un travail critique de la pensée sur elle-même, à réfléchir à l’histoire du discours, à sa fabrication et son historicisation.    

 Quels sont vos projets, vos travaux de recherche ?

Je travaille depuis de nombreuses années sur la question de la représentation du corps et plus précisément sur la  question de la « laideur ». Alors que de nombreuses interrogations ont été consacrées à la beauté, peu d’études se sont intéressées à la « laideur » d’un point de vue philosophique et anthropologique. Or cette question est loin d’être anodine si on considère que la « laideur » a participé à la différenciation des genres, à une hiérarchisation des individus en fonction des classes sociales, et de ce que l’on a appelé « la race ».

Interrogeant donc le corps tout imprimé d’histoire, selon la formulation de Michel Foucault, mes travaux ont élaboré une généalogie de la laideur en essayant de montrer  comment par-delà les rapports de domination, par-delà les mécanismes de coercition, la fabrication de la laideur a fait partie intégrante de la circulation du pouvoir. J’ai ainsi retracé comment la « laideur » en tant que redoutable outil de dévalorisation de l’être, a servi à inférioriser les peuples et les communautés,  générant la haine et la honte par-delà l’injure esthétique et morale. Dans ce cadre, j’ai démontré comment la laideur a trouvé sa réelle filiation dans ce que l’on pourrait nommer une « hontologie ». 

Actuellement, je poursuis mes recherches et termine la rédaction de deux ouvrages, l’un porte sur la philosophie de la laideur et l’autre sur une anthropologie de la laideur. D’autres projets sont également en cours mais, par manque de temps, encore à l’état embryonnaire.


En ce qui concerne les publications,  j’ai écrit l’essai intitulé Histoire de la laideur féminine, aux Editions Imago, qui a été préfacé par David Le Breton et postfacé par Georges Vigarello et traduit en plusieurs langues. J’ai également codirigé avec Emmeline Gros, l’ouvrage Normes et transgressions, « Traverses », 2017.

Je participe aussi à la rédaction d’articles dans des revues, ouvrages ou dictionnaires scientifiques. Récemment, j’ai contribué à l’essai intitulé Tous Malades, sous la direction de Florence Fix, (dir),  Paris, Orizons, 2018, avec un article sur La Représentation de l’homme malade dans l’art contemporain. De même, dans l’ouvrage Corps meurtris, beaux et subversifs, sous la direction d'Eva Carpigo et al., Presses Universitaires de Lorraine, 2018, ma contribution a porté sur La Nymphoplastie, comme nouveau design pour le sexe féminin.

Prochainement va paraître L’humiliation. Droit, récits et représentations du XIVe à nos jours, aux Editions Classiques Garnier sous la direction de Lucien Faggion, Christophe Régina, et Alexandra Roger. Dans cet ouvrage je propose une réflexion sur la fabrication de la laideur par-delà la tonte comme instrument d’humiliation.



Merci Claudine, pour ce témoignage !

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