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photo de Lilian Noiret

Lilian Noiret

Grenoble

Nous découvrons ici le parcours de Lilian Noiret, professeur de philosophie et poète...

Etudes, lectures, projets... Voici son témoignage !


Pouvez-vous vous présenter ? Que faites-vous actuellement ? 

Cela va vous paraître peut-être « gnangnan », prosaïque, mais je dirais que les deux personnes qui on fait de moi un « philosophe » et « poète 7 ans » sont mon grand-père que nous appelions avec tendresse « papy gâteau », Augusta, sa mère, Juste parmi les nations lui a enseigné des valeurs simples et de résistance pacifique. Il a caché un jeune juif qu’il a accueillit comme un frère à ses 16 ans. J’avais un premier modèle de personne ouverte à l’altérité et au don de soi quitte à risquer sa propre vie. Je ne l’ai appris qu’en 2013 lorsque que mon arrière-grand-mère a reçu la médaille à titre posthume.

Puis, il y a aussi mon grand oncle, Berger en bas de chez mes parents : chaque mercredi après-midi, mon grand-père savait que je partais surveiller les moutons avec le tonton Raymond qui m’a enseigné une grande sagesse paysanne, empreinte de simplicité et d’humilité. Mort récemment, un cousin germain qui s’occupait de lui, s’occupe encore aujourd’hui d’un enfant rom et ce tonton, il y a encore 7 mois était ouvert à la solidarité et l’altérité le peu de moment où son Alzheimer le lui permettait avec le jeune rom. Ils m’ont peut-être plus appris que mes professeurs de la fac en termes de philosophie…


En fait, je suis un professeur de philosophie un peu atypique, je n’ai jamais enseigné dans l’Education nationale par choix, et ce pour deux raisons : je ne veux plus noter les élèves (dans le passé j’ai été professeur de français/culture général pour des BTS et professeur de FLE, Français Langues Etrangères) et je souhaite dorénavant enseigner la philosophie à des personnes qui soit ne feront jamais de la philosophie comme les enfants, à ce titre, j’étais à l’ouverture de la Chaire UNESCO « Philo pour enfants » en 2016 dont le parrain était Michel Serres ; soit à des personnes qui n’en ont jamais fait comme lorsque je suis allé en maison de retraite.

Aujourd’hui, je le fais de manière bénévole avec de jeunes migrant-es isolés dans une association : 3aMIE à Grenoble et c’est un bonheur de se sentir utile.  Par ailleurs j’ai eu la chance d’être intervenant en 2017 à la fac où j’ai fais mes études invité par un ami Arnaud Sorosina et j’ai donné un cours de TD sur la Renaissance en philosophie de l’esthétique pour des étudiants en licence. Pour résumer, si je ne fais de philosophie, je déprime…

Quel souvenir gardez-vous de vos études ? De vos professeurs ? 

J’en garde un souvenir excellent, mes professeurs peut-être moins [sic], excepté Jacques Lambert qui donnait un cours d’épistémologie et aussi, un cours sur la Renaissance auquel j’ai eu la chance d’assister, un cours émouvant, car c’était son dernier cours avant la retraite universitaire, c’est le professeur qui m’a le plus marqué. Je disais plus haut tumultueux, car j’étais un étudiant, surtout en master, avec un manque de maturité certain, mais disons qu’en licence nous avons fait de la philosophie en acte en bloquant la fac et Villepin a cédé en 2006 lors de mon Master 1 rétropédalant avec le CPE (Contrat Premier Embauche).

Je me souviens encore avoir construit ma pensée en regardant et participant à cette démocratie en mouvement dans les AG (assemblées générales) étudiantes fabuleuses et qui donnait de l’espoir à un jeune étudiant en philosophie politique comme moi. Travaillant sur le pouvoir, l’autorité et la domination qui était de mon point de vue libertaire, pour ne pas dire anarchiste, surtout le concept d’autorité était une relation magique entre celui qui donne un ordre et celui qui le reçoit : pourquoi obéit-on à un chef, un professeur, à une figure d’autorité plus largement ? Qu’est-ce qui nous pousse à obéir ?

La Boétie nous dit qu’il suffit de ne plus servir, en substance, pour être libre et ayant lu La désobéissance civile de Thoreau à 17 ans, Foucault en troisième année de licence et son magnifique Surveiller et punir qui a conditionné ma recherche et l’influence encore aujourd’hui, ainsi que beaucoup d’auteur-es anarchistes, mais aussi des classiques de la philosophie politique comme Aristote ou Arendt. Je suis parti sur Antonio Negri avec mon stimulant directeur de mémoire et deux concepts : le pouvoir et multitude.

Ce qui a été génial, c’est que nous mangions tous les soirs avec mes ami-es de la fac chez moi et nous débattions avec passion des cours de la journée. On  construisait dans une « intelligence en essaim » doublée d’une grande solidarité naturelle et d’une joie de vivre qui me rend nostalgique en répondant à votre question. 

Quel est le livre de philosophie qui vous a particulièrement passionné ? L'auteur pour qui vous avez eu un véritable coup de foudre ? 

Il y a trois temps pour dire l’évolution de ma pensée philosophique : Nietzsche clairement que j’ai « ruminé », ou lu à la manière préconisée par Nietzsche lui-même en licence, trois ans durant. Puis, Foucault comme je l’ai dis ci-dessus que j’ai lu durant les 2 mois de vacances avant mon entrée en Master I ; puis enfin j’ai été libéré par la pensée de Spinoza que j’ai vraiment découvert avec Antonio Negri et d’autres penseurs. Mais j’ai adoré Deleuze et Guattari qui ont « décalé » ma pensée sur le champ inconnu pour moi qu’est la psychanalyse, la psychologie et plus encore…

En fait, je dois avoir un cœur philosophique d’artichaut puisque j’ai eu beaucoup de « coups de foudre », mais j’ai coutume de dire pour rigoler qu’Hannah Arendt est ma femme, dommage que quand je suis né elle était morte parce qu’elle est tellement « sexy » intellectuellement parlant. J’avoue être un peu jaloux de Günther Anders.

Avez-vous déjà essayé d'écrire ? Pourriez-vous nous parler de vos créations ?

Mon premier poème, je l’ai écris à 7 ans, je ne connaissais pas la poésie de Rimbaud et ma mère l’a accroché. J’avais copié le modèle d’une poésie de Du Bellay. J’écris un journal intime qui pourrait devenir soit un roman autobiographique, soit un livre philosophique. C’est mon fil rouge depuis 2013, un écrit cathartique plus que philosophie dans l’intention.

En termes universitaire, j’ai écris mon mémoire sur Negri en 2007, publié récemment. Durant mes études du journalisme philosophique (oui, je suivais mon modèle Hannah Arendt) deux fois dans le Sarkophage, un journal contre tous les sarkozismes, puis il est devenu les Z’Indignés, j’ai alors écrit sur la nécessité de faire de la philosophie pour enfants, car j’en fais depuis 2007 et donc depuis mon master II.

J’ai été plus publié en poésie sous un pseudo avec des amis poètes. Notre personnage conceptuel se nomme Alimano que nous avons décrit comme un sage heureux de sa folie (clin d’œil au début du Zarathoustra de Nietzsche).

J’ai failli faire une thèse sur Bakounine, auparavant en phénoménologie politique, mais des problèmes de santé m’ont empêché de réaliser mon rêve.

Aujourd’hui, j’ai un « projet » avec une philosophe camerounaise : Myriam merveille Atangana. Je ne révèle pas le sujet, tout ce que je peux dire, c’est qu’il sera dans le champ de la philosophie politique et morale.



Merci Lilian, pour ce témoignage !

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