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photo de Mathilde Ramadier

Mathilde Ramadier

Arles

Nous découvrons ici le parcours de Mathilde Ramadier, écrivaine titulaire d'un master de philosophie à l'ENS...

Etudes, lectures, projets... Voici son témoignage !


Pouvez-vous vous présenter ? Que faites vous actuellement ?

En un mot, j’écris. J’ai commencé avec des scénarios de romans graphiques (éd. Dargaud et Futuropolis) juste après avoir terminé mes études en 2011, en collaborant avec plusieurs dessinateurs et dessinatrices. Puis j’ai varié les formats : essais libres (éd. Premier Parallèle, Actes Sud), nouvelles, articles, reportages et billets d’humeur pour différents médias... Je traduis également des essais et des bandes dessinées de l’anglais et de l’allemand. 

Je me suis en quelque sorte éloignée de la philosophie sans jamais la quitter puisque je navigue entre les sciences humaines. Je traite de différents sujets à travers mes livres, mais disons qu’il existe une constante : les luttes et les rapports de domination... Puisqu’il s’agit essentiellement de critiques du monde du travail, d’écologie et de féminisme. J’ai emménagé à Berlin en 2011 après avoir vécu six ans à Paris et partage aujourd’hui mon temps entre la capitale allemande et Arles, une petite ville sublime à l’activité culturelle intense, à laquelle je suis très attachée.

Quel souvenir gardez-vous de vos études ? De vos professeurs ? 

Je garde un excellent souvenir de mes années d’études à Paris, où j’ai débarqué à 17 ans. Mon parcours est très atypique, peu linéaire. Aux yeux de certains, il peut paraître chaotique, mais il fut toujours marqué par des enchaînements logiques pour moi. J’ai toujours gardé en tête que je voulais allier les mots et les images, la pratique et la théorie.

Après un baccalauréat scientifique, je suis entrée à l’école d’art Olivier de Serres pour une mise à niveau en arts appliqués. Je me suis ensuite spécialisée en design graphique avec un BTS communication visuelle option édition. C’était un BTS en alternance, avec un rythme très intense, épuisant. Graphiste diplômée à 20 ans, j’avais l’opportunité de continuer les études et souhaitais en l’occurrence poursuivre dans un cursus moins professionnalisant pour nourrir ma soif d’apprendre. « Faire mes humanités » comme on disait avant... Je suis donc entrée à l’Université Paris VIII par équivalence en licence d’arts plastiques. De là, j’ai planté ma tente dans la BU et ai passé la même année un Master 1 d’Esthétique (spécialité art contemporain) et un Master 1 (recherche) de Psychanalyse. J

Je dois beaucoup à cette Université tolérante, à son ouverture, surtout face à des profils atypiques comme le mien, qui viennent de filières plus techniques. En 2010, pour finir, je suis entrée sur dossier à l’Ecole Normale Supérieure de la rue d’Ulm, pour un Master 2 en philosophie contemporaine cohabilité avec l’EHESS. 

J’ai gardé un lien amical avec Roberto Barbanti, mon professeur de philosophie à Paris VIII, avec qui je parle régulièrement d’écologie, et avec Marc Crépon, mon directeur de mémoire à l’ENS qui m’a toujours soutenue et encouragée, et a préfacé ma bande dessinée sur Sartre (Dargaud, 2015). De façon générale, les liens tissés avec certains professeurs ont toujours été déterminants, qu’ils aient contribué à orienter mes choix, à me faire progresser ou même à bâtir ma confiance en moi. Je ne crois pas que je pourrais étudier à distance, et je crois peu aux MOOCs. Peut-être parce que je suis fille de prof...

Quel est le livre de philosophie qui vous a particulièrement passionné ? L'auteur pour qui vous avez eu un véritable coup de foudre ? 

J’ai eu mes années Sartre et Freud, comme beaucoup de jeunes lecteurs, du lycée jusqu’à la fin des études. Je crois que la rencontre avec la psychanalyse a été un vrai choc, même si je ne cesse depuis de m’en émanciper (du moins j’essaie, on n’en sort jamais indemne). À l’image de mon parcours, je n’ai pas eu qu’un seul coup de foudre, mais plusieurs relations plus ou moins passionnelles ou durables. Ainsi j’ai beaucoup lu Jacques Lacan, Jacques Rancière, Bernard Stiegler, Michel Foucault, Simone de Beauvoir, Judith Butler, Georges Didi-Huberman... 

Quels sont vos projets, vos travaux de recherche ? 

Actuellement j’essaie d’écrire un roman, mais à vrai dire c’est un exercice extrêmement difficile. Je repense souvent aux mots de Sartre, qui affirmait que pour la philosophie, on pouvait avoir recours aux drogues, mais que la littérature, elle, devait rester « pure ». Comme si rien ne pouvait venir en aide à l’écrivain penché sur son roman. C’est un peu comme cela que je conçois aussi ce long marathon solitaire, presque masochiste.

Parallèlement, je me tourne de plus en plus vers le féminisme, et m’intéresse aux liens qu’il peut tisser avec l’écologie. C’est cela qui oriente mes lectures ces derniers mois. J’ai un projet de bande dessinée et d’essai en cours, et reviens régulièrement en France pour participer à des rencontres, lectures... J’aime alterner entre des phases de solitude avec l’écriture et des périodes socialement très actives, faites de rencontres, de résidences, et de nouvelles collaborations, parfois inattendues. C’est ça aussi que m’a enseigné la philosophie : ouvrir les yeux, tendre l’oreille, essayer, essayer encore, et ne pas (trop) se spécialiser...



Merci Mathilde, pour ce témoignage !

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