photo de Lucile Bokobza

Lucile Bokobza

Paris

Nous découvrons ici le parcours de Lucile Bokobza, étudiante préparant un master de philosophie à la Sorbonne et musicienne...

Etudes, lectures, projets... Voici son témoignage !


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Pouvez-vous vous présenter ? Que faites vous actuellement ?

Après mon baccalauréat scientifique, je suis directement allée en licence de philosophie à Paris 1. J’ai très rapidement décidé d’étudier la biologie en parallèle de la philosophie, ce qui m’a amené à suivre des cours au Centre de Recherches Interdisciplinaires (hébergé entre Paris 5 et Paris 7). En première année de master, j’ai donc tout naturellement décidé d’étudier les rétrovirus par rapport au domaine du vivant.

Je suis actuellement en train de conclure ma deuxième année de master de philosophie, en rédigeant mon mémoire qui porte sur les émotions et l’apathie relativement aux normes et contextes. Je me prépare également pour passer la session 2019 de l’agrégation de philosophie. En parallèle de ce cursus universitaire à Paris 1, je me consacre aussi à l’étude de la musique au Conservatoire, et plus particulièrement à l’histoire de la musique contemporaine.

Quel souvenir gardez-vous de vos études ? De vos professeurs ?

Mes études sont encore très fraîches, je me sens encore immergée dedans, malgré l’obtention du M2 qui approche. J’estime que mes études de philosophie ont véritablement débuté avec mon entrée à Paris 1, juste après le baccalauréat. Je savais que je n’étais pas faite pour faire une classe préparatoire, car j’ai souffert de phobie scolaire durant presque toute la période du lycée. La fac m’a donc permis de respirer un peu et de m’ouvrir à beaucoup plus de choses qui ne sont pas dans les programmes des licences de philosophie classiques. En particulier, j’ai pu me réintéresser à la biologie sous différents aspects, qui ne rentrent pas dans les cases du programme de secondaire. J’ai aussi pu me réapproprier les sciences à travers leur unité, plutôt que de garder une approche parcellaire du savoir et des champs disciplinaires.


Niveau philosophie, je dirais que trois de mes enseignants ont été déterminants dans mon enrichissement, à la fois personnel et universitaire. Au niveau de la « philosophie pour le loisir », j’aime beaucoup la philosophie allemande, à partir de Kant et après, qui me permet de cogiter sur de nombreux problèmes. Mon ancien professeur, Christian Bonnet, m’a beaucoup apporté grâce à ses cours sur Schopenhauer, Kant et les néo-kantiens. Ainsi, je peux mieux appréhender ce nœud de différents champs philosophiques qui se regroupent autour de l’œuvre kantienne.

Ensuite, j’ai beaucoup appris en travaillant sous la direction de Michel Morange en première année de master. J’avais lu son livre La Vie expliquée ? dès la première année de licence, et ses conseils lorsque j’ai été sous sa direction m’ont été très précieux, plus précisément pour étudier le domaine du vivant du point de vue de la philosophie de la biologie.

Enfin, le dernier professeur qui m’a marquée est mon directeur de recherche actuel, Jocelyn Benoist. Sa recherche étant vertigineusement dense, il m’accompagne toujours de façon extrêmement pertinente dans les différents champs disciplinaires que je parcours ; il est également un interlocuteur très stimulant.

Quel est le livre de philosophie qui vous a particulièrement passionné ? L'auteur pour qui vous avez eu un véritable coup de foudre ?

Je dirais qu’il y a deux œuvres qui ont vraiment été déterminantes dans mon parcours philosophique, bien qu’elles ne soient pas au centre de ma recherche.

Le premier philosophe que je souhaiterais citer est Schopenhauer, en particulier pour Le Monde comme volonté et comme représentation et De la quadruple racine du principe de raison suffisante. Comme je l’ai dit, j’aime beaucoup la philosophie allemande car celle-ci me fait particulièrement réfléchir. Je trouve passionnant de lire la pensée de Schopenhauer, en particulier lorsqu’on peut la mettre en parallèle avec d’autres pensées néo-kantiennes de l’époque. Je trouve également extrêmement intéressant de mettre en parallèle tout ce bagage kantien qui imprègne ses recherches avec des modèles perceptifs issus des sciences cognitives actuelles. En effet, l’on sait que beaucoup de recherches en sciences cognitives  — en particulier autour de la perception — ont été faites à partir des recherches kantiennes ; je trouve donc cela pertinent d’intégrer Schopenhauer dans ce champ de recherche.

La deuxième œuvre qui ne cesse de me stimuler depuis bientôt plus de quatre ans est celle de Tim Ingold. J’ai tout d’abord été frappée par l’inter et la pluridisciplinarité de sa recherche, étant donné qu’il mêle physique, anthropologie et musique. Mais ce qui a été le plus déterminant dans mes orientations philosophiques a surtout été la perspective interactionniste du vivant qu’il développe — principalement à partir de son background de physicien, qui le pousse à déterminer le vivant comme une synergie particulière — et d’où il s’ensuit un développement d’une anthropologie de la vie très particulière. Je pense sincèrement que les sciences de laboratoire gagneraient beaucoup à lire Ingold.

Quels sont vos projets, vos travaux de recherche ?

Comme je l’ai dit en amont, mon projet de recherche actuel traite des émotions et de l’apathie, en essayant de mêler différents champs disciplinaires (la psychologie, les sciences cognitives, la phénoménologie et la philosophie analytique principalement). Cependant, durant toute une partie de mon parcours, j’ai entretenu une certaine acquaintance avec la biologie. Je pense donc me laisser un an pour avoir — ou ne pas avoir — l’agrégation, et ensuite retourner brièvement vers les sciences de laboratoire. Je souhaiterais étudier de nouveau le vivant, mais toujours selon un angle très spécifique. Ensuite, j’aimerais avoir une bourse de thèse pour travailler sur les contextes et les normes, mais toujours en trouvant un moyen d’y inclure mon bagage scientifique qui me tient beaucoup à cœur.



Merci Lucile, pour ce témoignage ! (NDLR : retrouvez Lucile sur son compte Twitter. Ses tweets, souvents spirituels ou instructifs, valent le détour...)

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