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photo de Mélanie Trouessin

Mélanie Trouessin

Savoie

Nous découvrons ici le parcours de Mélanie Trouessin, docteure de philosophie, enseignante en Savoie, particulièrement intéressée par le thème de l'addiction...

Etudes, lectures, projets... Voici son témoignage !


Pouvez-vous vous présenter ? Que faites-vous actuellement ?

Après une thèse de philosophie sur les addictions, soutenue en novembre 2017 à l'ENS de Lyon, je suis actuellement enseignante en classe de Terminale dans un lycée technique et scientifique. Je continue en parallèle certaines activités de recherche : j’anime par exemple des séances de formation au sein d’une unité d’addictologie lyonnaise, dont le but est de réfléchir ensemble à ce que signifient des concepts philosophiques tels que les concepts de « volonté » ou de « mauvaise foi », souvent utilisés par les patients. 

Quel souvenir gardez-vous de vos études ? De vos professeurs ?

Je garde de mes études un très bon souvenir, en particulier de mes cours de français en Première et de philosophie en Terminale. J’ai eu dans ces deux matières deux excellents professeurs qui m’ont fait non seulement aimer leur matière mais qui m’ont surtout permis de développer au maximum mes goûts et mes capacités de travail. Ces deux professeurs restent un modèle pour moi qui débute l’enseignement dans le secondaire. 

En classe préparatoire, je garde également un très bon souvenir de mon professeur de Khâgne, qui m’a particulièrement accompagné pendant ces deux années et la préparation au concours de l’ENS.

J’ai retenu de mes professeurs la nécessité de l’effort pour rendre accessible un savoir, la nécessité de toujours clarifier les choses, sans les simplifier, ce qui n’est pas toujours facile en philosophie.

Quel est le livre de philosophie qui vous a particulièrement passionné ? L’auteur pour qui vous avez eu un véritable coup de foudre ?

Le livre qui m’a véritablement fait entrer dans la philosophie n’est pas une œuvre de philosophie à proprement parler mais un roman, avec selon moi une grande portée philosophique tout de même. Je l’ai découvert lors d’un exposé à faire en Terminale et l’avais choisi dans une liste donnée par mon professeur de philosophie. Il s’agit du roman d’Éric-Emmanuel Schmitt, intitulé La part de l’autre.

Dans ce roman, mi-fictif, mi-historique, EE Schmitt parle d’Hitler et de ce qu’il a été aussi bien de ce qu’il aurait pu être. Au-delà de certains très beaux passages (la lettre d’Adolf à ses amis alors qu’il croit qu’il va mourir, par exemple), ce qui m’a le plus intéressé est notre rapport au mal, aux criminels et à la façon que nous avons de les exclure de l’humanité. EE Schmitt montre bien comment la question du mal est souvent reléguée vers ce qui est inhumain, bestial alors que c’est justement la capacité de mal agir qui caractérise sans doute le mieux l’être humain. S’il y a depuis d’autres ouvrages philosophiques qui m’ont beaucoup marqué, celui-ci est le premier à avoir autant résonné.


Je n’ai pas à proprement parler d’auteur fétiche en philosophie mais j’ai un faible pour certains auteurs un peu « mal aimés » de la galaxie philosophique comme par exemple le philosophe danois Soren Kierkegaard. Considéré comme un philosophe pessimiste, avec un contenu doctrinal trop religieux et déprimant, il est en réalité aussi à l’origine de nombreux essais lumineux, parfois très drôles, sur les questions de l’existence et du temps. La façon dont il conçoit l’être humain à travers ses différents rapports au temps et aux choix essentiels de la vie me semble particulièrement pertinente. Il a également révélé avant Sartre toute la contingence de notre existence, l’angoisse qui en découle en même temps que la liberté qui nous caractérise en tant qu’êtres humains.

Quels sont vos projets, vos travaux de recherche ?

J’ai d’abord le projet de publier ma thèse de doctorat assez rapidement et dois pour cela retravailler le manuscrit. En vue de consolider les résultats de ma thèse, j’aimerais en particulier reprendre la question du lien entre TOC et addictions, dans la mesure où je soutiens que la perte de liberté dans l’addiction réside avant tous dans nos pensées et non dans nos actes.

À plus long terme, j’aimerais travailler encore plus étroitement avec le milieu médical et en particulier celui de l’addictologie. En dépit de l’aspect parfois un peu solitaire de la recherche en sciences humaines, ce sont les interactions avec les personnes qui m’intéressent le plus ; je voudrais donc continuer à animer des formations de réflexion conjointe avec des professionnels de santé. En d’autres termes, j’aimerais concilier mon travail sur les addictions, thème passionnant à la jonction des domaines médical, moral et de la vie quotidienne, et l’enseignement, que cela soit au lycée ou avec d’autres publics.



Merci Mélanie, pour ce témoignage !

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