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photo de Thomas Bonnin

Thomas Bonnin

Paris

Nous découvrons ici le parcours de Thomas Bonnin, chercheur postdoctoral en histoire et philosophie de la médecine à l'Université de Bordeaux.

Etudes, lectures, projets... Voici son témoignage !


Pouvez-vous vous présenter ? Que faites vous actuellement ?

Je suis un chercheur en début de carrière en histoire et philosophie des sciences. J’ai commencé par un cursus en sciences du vivant jusqu’en M1 à l’université de Bordeaux, puis j’ai transité vers un M2 en histoire et philosophie des sciences à l’université de Lille. Je me suis par deux fois exilé vers le voisin britannique au cours de mes études : d’abord pour une année Erasmus à l’université du Kent à Canterbury, puis pour effectuer ma thèse à l’université d’Exeter

Mes domaines de spécialité sont les sciences biologiques et biomédicales, et je suis principalement intéressé par l’étude des pratiques scientifiques contemporaines. Mon travail de thèse consiste en une étude de la production de savoir sur l’histoire de la vie en biologie de l’évolution. Après avoir enseigné au semestre dernier à l’ESPOL, à Lille, je viens d’attaquer un contrat de deux ans au sein d’un projet interdisciplinaire, basé au Centre Emile Durkheim à l’Université de Bordeaux, qui étudie le regain d’intérêt pour les bactériophages dans le traitement d’infections bactériennes. 

Quel souvenir gardez-vous de vos études ? De vos professeurs ? 

A première vue, j’ai l’impression d’avoir beaucoup cravaché. 

Il a d’abord fallu faire siens (avec ou sans motivation) un langage, des raisonnements et des pratiques de plus en plus sophistiquées en biologie

Puis ma transition vers l’histoire et philosophie des sciences a été extrêmement, peut-être trop, brutale. J’ai passé mon année de M2 et mon début de thèse à essayer de comprendre où j’étais et ce que je faisais. A la fois je cherchais à recréer mes bases et en même temps il fallait que j’écrive un mémoire de master, puis une thèse de doctorat ! 

De la thèse, je garde le souvenir d'une expérience intellectuelle et humaine démesurée – un investissement d’énergie qui aujourd’hui me permet de prendre de plus en plus de plaisir à faire ce que je fais. 


Côté enseignants, j’ai été particulièrement marqué par le cours de Michel Rigoulet en biochimie métabolique : au lieu d’une présentation linéaire de savoirs à ingurgiter, il analysait avec nous une série de résultats d’expériences et le savoir qu’on pouvait en tirer. Le premier (et seul !) cours de philosophie des sciences que j’ai suivi est celui d’Anouk Barberousse, et j’ai le souvenir d’une enseignante extrêmement stimulante, ouverte et bienveillante. Chaque cours me laissait avec la sensation d’avoir tellement de choses à découvrir. 

Durant ma thèse, j’ai été particulièrement impressionné par John Dupré, mon directeur, Sabina Leonelli, Alison Wylie, Hasok Chang et Adrian Currie. Des chercheurs à différents stades de leurs carrières mais qui ont en commun une grande curiosité et un intérêt pour le travail des autres (y compris les balbutiements de jeunes doctorants) et qui sont d’une vivacité intellectuelle ahurissante. C’est un privilège de pouvoir travailler et apprendre avec eux. 

Quel est le livre de philosophie qui vous a particulièrement passionné ? L'auteur pour qui vous avez eu un véritable coup de foudre ?

Lorsque j’ai commencé à vraiment m’intéresser à la discipline, je me souviens avoir été particulièrement impressionné par Le Normal et le Pathologique de Canguilhem. C’était intéressant, récemment, de m’y replonger pour un cours que je donnais. 

Je tire toujours des tas de choses des chapitres de la collection Thinking from Things de Wylie et du livre Is Water H2O ? de Chang. J’avoue aussi avoir une certaine fascination pour Paul Feyerabend. J’ai lu son autobiographie et ses échanges épistolaires avec Imre Lakatos récemment. Je pense qu’il était aussi brillant et rigoureux que désabusé et ironique. C’est amusant de voir qu’il est devenu une espèce d’épouvantail relativiste pour certains. 

Quels sont vos projets, vos travaux de recherche ? 

Je débute tout juste à Bordeaux un travail sur l'histoire de la phagothérapie qui devrait me tenir bien occupé pour les deux ans qui viennent. Il faut que je fasse le tour de la littérature existante et que je définisse un angle d'attaque. J'ai très hâte de rentrer dans le vif du sujet ! En parallèle, je suis en train de publier des articles dérivés de mon travail de thèse sur les sciences historiques. C’est agréable de commencer à prendre de la distance avec mon doctorat, et d’approfondir certaines des questions traitées. Peut-être qu’un jour je prendrais le temps d’en faire un livre, mais je n’en ressens pas le besoin aujourd’hui. 

Un peu accidentellement, il y a quelques étés, j’ai effectué une traduction en français du très beau livre d’Havi Carel, Illness, sur l’expérience de la maladie. La traduction est maintenant sous contrat, et le livre devrait, j’espère, voir le jour d’ici quelques mois.



Merci Thomas, pour ce témoignage !

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