Fresque de Michel-Ange

Notion : la religion

La culture

Ce cours sur la religion vous aidera à préparer l'épreuve de philosophie du bac, quelle que soit votre filière (L, ES, S).

Au programme : la critique marxiste de la religion, les arguments philosophiques pour prouver l'existence de Dieu, le célèbre pari de Pascal ...

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Sujet possible : La religion n’est-elle qu’une illusion ?


La religion nous demande d’adhérer sans preuves à l’idée d’un être supérieur, infiniment bon. Il semble qu’on sorte d’emblée par là du champ de la raison, puisqu’un jugement n’est rationnel que s’il se fonde sur une démonstration ou une expérience.

Mais est-il si irrationnel de croire en un Dieu transcendant et supérieur à nous ? Ne s’agit-il là que d’une illusion ?

La religion comme illusion – Marx

Lorsque Marx affirme la religion est l’opium du peuple, il compare la religion à une illusion, visant spécifiquement une certaine classe sociale : le peuple.

Qu’est-ce que l’opium ? Il s’agit d’une drogue, dont l’effet immédiat est d’endormir celui qui l’absorbe, le plongeant dans un sommeil profond peuplé de rêves étranges et effrayants.

Comparer la religion à l’opium, ce serait donc affirmer que la religion a pour but d’endormir le peuple, l’empêchant de se révolter face à une situation sociale injuste. Il s’agirait d’une ruse des classes dirigeantes, la classe bourgeoise, pour prévenir toute révolte de la part des prolétaires. Autrement dit : pour empêcher que ceux qui ne possèdent que la force de travail de leurs bras ne s’approprient les moyens de production (machines, ateliers) possédés par les bourgeois, qui leur louent.


En quoi la religion aurait-elle ce pouvoir anesthésiant ?

La religion incite à ne pas chercher le bonheur dans cette vie, ici et maintenant, dans notre réalité quotidienne, mais dans une autre réalité, accessible uniquement après la mort. Le bonheur n’est pas à chercher au présent, il ne se conjugue qu’au futur.

Pour atteindre ce bonheur promis, il faut respecter certaines valeurs, adopter certains comportements : l’humilité, le pardon, la pauvreté, la non-violence... Comme on le voit, ces valeurs sont tout à fait favorables aux classes dirigeantes, et empêchent toute révolte pour modifier l’état social existant, même s’il est injuste. Si le christianisme incite à la charité les dirigeants des classes supérieures, il ne vise pas l’instauration d’un ordre social différent dans lequel la charité serait inutile.


Une illusion n’est pas simplement une erreur, il s’agit d’une erreur à laquelle on a tout intérêt de croire. On désire croire en une illusion ; ce qui n’est pas le cas d’une simple erreur. C’est ce qu’a relevé Freud, qui dans l’Avenir d’une Illusion note : Ce qui caractérise l'illusion, c'est d'être dérivée des désirs humains. 2+2=5 est une erreur, tandis que Christophe Colomb qui croit découvrir l’Amérique est dans l’illusion : il a envie que sa croyance (fausse) soit juste.

Si la religion est une erreur qui sert les intérêts des classes dirigeantes, en quoi peut-elle correspondre à un désir des classes inférieures ? En quoi le peuple peut-il désirer être trompé ainsi ?

Cela vient de ce que la religion lui ôte la responsabilité angoissante de prendre son destin en main et de lutter pour changer l’ordre des choses. La religion le délivre de l’angoisse de la liberté.

C’est là un gain à court terme qui correspond à un désir réel et fait de la religion une illusion. Il est difficile de secouer ses chaînes et de se libérer, ainsi que Marx le remarque dans la Critique de la Philosophie du droit de Hegel :


L’abolition de la religion en tant que bonheur illusoire du peuple est l’exigence de son bonheur réel. Exiger qu’il renonce aux illusions sur sa situation c’est exiger qu’il renonce à une situation qui a besoin d’illusions.
La critique de la religion est donc, en germe, la critique de cette vallée de larmes dont la religion est l’auréole. La critique a dépouillé les chaînes des fleurs imaginaires qui les recouvraient, non pour que l’homme continue à porter des chaînes sans fantaisie, désespérantes, mais pour qu’il rejette ces chaînes et cueille les fleurs vivantes.
La critique de la religion détruit les illusions de l’homme pour qu’il pense, agisse, façonne sa réalité comme un homme sans illusions parvenu à l’âge de la raison


Néanmoins, on peut remettre en cause l’idée selon laquelle le concept d’un Dieu, à savoir d’un être infini et parfait, serait dépourvu de toute rationalité.

En fait nombreux sont les arguments rationnels qui peuvent prouver l’existence d’un Dieu. En ce sens, raison et foi seraient conciliables, et la religion ne serait pas l’illusion que dénonce Marx.

Les arguments rationnels pour prouver l’existence d’un Dieu

La métaphysique est la discipline qui prend pour objet ce qui dépasse l’expérience du monde sensible, ce qui est « au-delà (meta) du physique ». Dieu, l’âme, l’infini, en font partie.

Les métaphysiciens ont essayé de prouver l’existence de Dieu, en utilisant plusieurs types d’arguments.


Kant en identifie trois sortes dans la Critique de la Raison pure :

-l’argument physico-théologique : la beauté du monde, l’ordre qu’on trouve en celui-ci, prouvent l’existence de Dieu. La matière seule, assistée du simple hasard, ne peut parvenir à créer l’univers dans la Beauté et les lois harmonieuses et constantes que nous lui connaissons.

-l’argument cosmologique : tout a une cause. Mais si tel effet a une cause qui elle-même a une cause, qui elle-même a une cause, etc., alors pour éviter une régression à l’infini, il faut bien parvenir à une cause première : Dieu.

-l’argument ontologique : repris par Descartes de Saint Anselme, il peut se résumer ainsi : Dieu désigne le concept d’un être parfait. Or ce qui existe est plus parfait que ce qui n’existe pas. Donc Dieu existe. Son existence se déduit de sa perfection même.

Comme on le voit, il existe plusieurs arguments rationnels pour fonder l’existence de Dieu. Ce qui montre que la religion n’est pas une illusion. Ce n’est pas simplement notre désir ou nos intérêts qui nous amènent à croire en l’existence d’un Dieu suprême, mais notre raison elle-même.


Cependant, Kant a montré que la métaphysique ne constituait pas une authentique connaissance, mais relevait de la simple croyance. En effet, une connaissance nécessite l’union d’un concept et d’une intuition, or la métaphysique est une science qui repose sur le simple concept : aucune intuition ou expérience ne peut venir remplir ou fonder ces concepts.

La religion retomberait-elle, avec la métaphysique, au rang de simple illusion ?


Non : on peut imaginer un certain type de rationalité, le calcul, qui nous amène à croire en Dieu. Telle est le sens du célèbre pari de Pascal.



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