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couverture du livre Idée d'une histoire universelle au point de vue cosmopolitique

Résumé de : Idée d'une histoire universelle au point de vue cosmopolitique

Publié en 1784, cet essai philosophique de Kant vise à montrer que l’Histoire a un sens, c’est-à-dire que le cours des événements humains ne se déroule pas simplement au hasard. Quel est ce but de l’Histoire, et quel est le mécanisme secret, le moteur caché qui nous mène vers celui-ci ? Telles sont les questions auxquelles Kant s’efforce de répondre.



Du même auteur : Critique de la Raison pure


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Y a-t-il un sens de l’Histoire ? Ou l’Histoire va-t-elle au hasard ?


Pour Kant, le hasard n’est qu’apparent. En effet « les actions humaines sont déterminées exactement comme tout autre événement naturel selon les lois universelles de la Nature. 1

On se souvient en effet que Kant a établi dans la Critique de la Raison Pratique qu’il y a un déterminisme phénoménal, même si la liberté existe comme noumène.

L’Histoire n’est autre chose que l’ensemble phénoménal des actions de l’homme, elle relève donc du déterminisme.

Ce qui semble désordonné et irrationnel dans l’Histoire du point de vue de l’individu se révèle du point de vue de l’espèce comme un développement progressif et continu, quoique lent, de ses dispositions originelles 2.


Kant prend deux exemples pour nous faire saisir cet ordre, qui se dissimule sous une irrationalité de surface. Les morts, les naissances et les mariages paraissent se produire de manière irrégulière, par hasard ou selon la volonté fluctuante des hommes. Or des tableaux statistiques montrent qu’ils se produisent finalement selon des lois naturelles constantes. De même, les pluies, bien qu’irrégulières, finissent toujours par être plus ou moins les mêmes sur un territoire donné.

En fait, il y a un sens de l’Histoire, que Kant nomme dessein de la Nature, poursuivi « inconsciemment » par les hommes :

Les hommes pris individuellement, et même des peuples entiers ne songent guère au fait qu’en poursuivant leurs fins particulières chacun selon son bon plaisir, ils suivent à leur insu, comme un fil conducteur, le dessein de la Nature, qui leur est lui-même inconnu, et travaillent à favoriser sa réalisation 3.

Avec tant d’absurdité et de vice chez chacun, on ne peut supposer aucun dessein personnel raisonnable, mais peut-être un dessein de la Nature.


Kant esquisse le fil conducteur de cette Histoire, au moyen de neuf propositions.


Proposition 1 : Toutes les dispositions naturelles d’une créature sont destinées à se développer un jour complètement et conformément à une fin 4.

Ainsi, un organe non utilisé est une contradiction en soi. Cette proposition est confirmée, d’un point de vue biologique, par la médecine (dissection). Si ce principe était faux, nous n’aurions plus affaire à une Nature conforme à des lois mais à une Nature qui joue sans aucun but.


Proposition 2 : les dispositions naturelles de l’homme à la raison ne se développent complètement que dans l’espèce, non dans l’individu.

Kant définit la raison comme un pouvoir permettant d’étendre bien au-delà de l’instinct naturel les règles et les desseins qui commandent l’usage de toutes ses forces 5.


Proposition 3 : l’homme ne pourra prendre part à aucune autre félicité ou perfection que celle qu’il s’est créée lui-même, indépendamment de l’instinct, par sa propre raison 6.

On peut remarquer que l’homme est né presque « nu », sans aucun avantage naturel. Pour sa sécurité, il n’a ni la corne du taureau, ni la griffe du lion, ni les crocs du chien, seulement des mains. Tout se passe donc comme si la Nature voulait que l’homme ne doive ses progrès qu’à lui-même, comme si le dessein de la Nature était non pas de rendre l’homme heureux, mais digne du bonheur.


Proposition 4 : Le moyen dont se sert la Nature pour mener à bien le développement de toutes ses dispositions est leur antagonisme dans la société 7.


Le fondement de cet antagonisme, c’est, selon la célèbre expression de Kant, l’insociable sociabilité des hommes 8, autrement dit, leur tendance à entrer en société, liée à une résistance à le faire qui menace sans cesse de scinder cette société.

L’homme ressent le bénéfice de la société (dans cet état, il se développe mieux) mais en même temps, il a ce caractère insociable de vouloir tout régler à sa guise 9, de résister aux autres, etc.

Or c’est cette résistance qui éveille toutes les forces de l’homme, qui le conduit à surmonter sa tendance à la paresse.

1 Idée d’une histoire universelle, Nathan, trad. J. Laffitte, Paris, 2005, Introduction, p.32
2 ibid.
3 ibid.
4 prop. 1, p.33
5 prop.2, p.34
6 prop.3, p.34
7 prop.4, p.36
8 ibid.
9 ibid.