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couverture du livre l'Ethique de Spinoza

Résumé de : l'Ethique

L’Ethique de Spinoza n’est publiée qu’à sa mort, en 1677, pour éviter la censure. Ce livre est d’ailleurs interdit dès l’année suivante. Il y développe ses idées à la façon des mathématiciens (en faisant s’enchaîner des propositions rigoureusement déduites les unes des autres). Dieu, la liberté, les passions, sont examinés tour à tour, pour élaborer une nouvelle définition du sage.


Livre I : De Dieu

Dans l’Ethique, Spinoza, fasciné par la rigueur et la clarté du modèle mathématique, se donne pour visée d’appliquer la méthode géométrique à la philosophie.

On sait que cette méthode procède par définitions, axiomes, puis s’élève de propositions en propositions rigoureusement déduites les unes des autres jusqu’à atteindre la vérité à démontrer.


Les définitions ont pour objectif d’indiquer précisément le sens des termes dont on va se servir, afin qu’il n’y ait nulle ambiguïté ou équivoque possible.

Les axiomes posent des vérités considérées comme évidentes, et qui vont servir de base aux démonstrations. Ce ne sont plus de simples définitions, au sens où ils ne se contentent pas de déterminer le sens d’un mot dont on va se servir : ce sont de vrais jugements prédicatifs qui disent quelque chose de quelque chose et prétendent au statut de vérité évidente.


Prenons quelques exemples de définitions et d’axiomes proposés par Spinoza.

Parmi les définitions, on trouve au livre I, celle, célèbre, de la cause de soi (causa sui) : Par cause de soi, j’entends ce dont l’essence enveloppe l’existence, autrement dit ce dont la nature ne peut se concevoir qu’existante 1.

Ou encore celle de la substance : Par substance, j’entends ce qui est en soi et se conçoit par soi : c’est-à-dire ce dont le concept n’a pas besoin du concept d’autre chose, d’où il faille le former 2.

Ces deux définitions sont fondamentales, car elles définissent Dieu pour Spinoza. Dieu est cause de soi, et Dieu est substance. Plus précisément, Dieu est seule cause de soi, et seule substance.

Parmi les axiomes, on trouve par exemple : Etant donné une cause déterminée, il en suit nécessairement un effet, et au contraire, s’il n’y a aucune cause déterminée, il est impossible qu’un effet s’ensuive 3.

On voit que Spinoza ne se contente pas ici de définir le concept de cause, mais affirme une vérité reconnue comme évidente sur la réalité du rapport entre un effet et une cause.


A partir de ce mécanisme argumentatif « more geometrico », Spinoza s’élève donc de propositions en propositions, qu’il déduit les unes des autres.

Par exemple, de la proposition 7 : A la nature d’une substance appartient d’exister 4, et de la proposition 8 : Toute substance est nécessairement infinie 5, Spinoza déduit la proposition 11 :

Dieu autrement dit une substance consistant en une infinité d’attributs dont chacun exprime une essence éternelle et infinie existe nécessairement 6.


Spinoza utilise des termes issus de l’ancienne scolastique : substance, attribut, essence, etc. Mais il leur donne un sens nouveau, et l’utilisation de cette méthode géométrique en philosophie est novatrice.

Surtout, les résultats auxquels il va parvenir dans l’Ethique sont éminemment modernes.

Dieu en effet est certes substance infinie, dont tout le reste n’est qu’attribut, Dieu certes est perfection, dont tout le reste procède. Mais Spinoza au livre IV, définit au détour d’une proposition ce qu’il entend par Dieu : la Nature.

Il parle de la puissance même de Dieu, autrement dit de la Nature 7 : Deus sive Natura.

Or si Dieu n’est autre chose que la Nature, il n’y a en fait pas de Dieu. Dieu n’est qu’un nom donné à la Nature, et il n’y a pas de Dieu transcendant (extérieur et supérieur) à celle-ci.

C’est donc là un des premiers philosophes qui, au 17ème siècle, développe, de manière dissimulée pour échapper à la censure, un athéisme au cœur de sa philosophie.


Dieu, autrement dit la Nature, est donc défini comme substance ayant une infinité d’attributs. Expliquons rapidement le sens traditionnel de ces termes « substance » et « attribut ». Prenons un homme. Il est riche, grand, célèbre. Ces déterminations sont des attributs, au sens où elles peuvent être modifiées sans que le sujet ne disparaisse. Cet homme riche peut devenir pauvre, il restera tout de même cet individu. Ce sont donc des déterminations non essentielles d’une personne (ou d’une chose), que l’on appelle des attributs.

1 Ethique, Seuil, Paris, 1999, trad. B. Pautrat, livre I, déf. 1, p.15
2 livre I, déf. 3, p.15
3 livre I, axiome 3, p.17
4 p.23
5 ibid.
6 p.29
7 livre IV, prop. 4, p.349