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couverture du livre l'Etre et le Néant de Sartre

Résumé de l'Etre et le Néant (page 8)


Or je peux essayer de récupérer cet être que je suis, qui est à distance, en autrui : Je suis projet de récupération de mon être 1. Cela n’est possible que si je m’assimile la liberté d’autrui. C’est là l’amour : m’emparer de la liberté d’autrui.


Ainsi l’amant ne désire pas l’asservissement de l’aimé. Il ne tient pas à devenir l’objet d’une passion mécanique : Il ne veut pas posséder un automatisme 2, être aimé par déterminisme psychologique (il se sentirait dévalorisé).

En fait, l’amant ne désire pas posséder l’aimé comme on possède une chose : il réclame un type spécial d’appropriation : il veut posséder une liberté comme liberté 3. Il veut être aimé par une liberté et réclame que cette liberté comme liberté ne soit plus libre 4 (de le quitter, de s’en aller, etc.)

Cela procure un grand bonheur :

Au lieu qu’avant d’être aimés, nous étions inquiets de cette protubérance injustifiée qu’était notre existence, maintenant, cette existence est voulue par une liberté que nous voulons nous-mêmes avec notre propre liberté. C’est là le fond de la joie d’amour : nous sentir justifiés d’exister 5.


Mais en fait l’amour est toujours un échec, pour trois raisons :

C’est un renvoi à l’infini puisque aimer est vouloir que l’autre veuille que je l’aime 6. D’autre part, le réveil de l’autre est toujours possible, il peut toujours me faire comparaître comme objet ; il y a donc une insécurité perpétuelle de l’amour. Enfin, notre amour est un absolu perpétuellement relativisé par les autres. Il faudrait être seul au monde avec l’aimé.


2/ l’indifférence, le désir, la haine

Le deuxième type d’attitude que je peux adopter est de transformer l’autre en objet.

Par exemple, dans l’indifférence : les autres ne sont que des objets ou des fonctions : le poinçonneur n’est qu’une simple fonction de poinçonner, etc. : Il y a des hommes qui meurent sans avoir – sauf pendant de brèves et terrifiantes illuminations, soupçonné ce qu’était l’Autre 7.

Ou encore dans le désir. Celui-ci n’implique pas l’acte sexuel. Il révèle la facticité de mon corps et de celui d’autrui, c’est-à-dire mon corps comme chair.

Le désir est lui aussi échec : le plaisir est sa fin.

Quatrième partie : avoir, faire et être

Sartre examine à présent ces trois catégories cardinales qui subsument sous elles toutes les conduites de l’homme 8. Ainsi le connaître n’est autre chose qu’une modalité de l’avoir.


L’action est intentionnelle. Le fumeur qui fait exploser par mégarde une poudrière n’a pas agi.

L’action obéit bien à un mobile (contre les partisans de la liberté d’indifférence, ou de l’action sans motifs), mais ce n’est pas pour autant qu’il faut adhérer au déterminisme. C’est en effet le pour soi qui confère au mobile sa valeur de mobile.

C’est pourquoi la liberté est l’étoffe de mon être 9, ce qu’on peut reformuler ainsi : Je suis condamné à être libre 10.

Il faut différencier le motif du mobile d’une action. Si le motif est la raison d’un acte, l’ensemble des considérations rationnelles qui le justifient 11, le mobile est un fait subjectif […], l’ensemble des désirs, des émotions, et des passions qui me poussent à accomplir un certain acte 12.

Le motif ne peut, contrairement à ce qu’affirme le déterminisme, déterminer l’action, y compris dans ce calcul rationnel des motifs qu’est la délibération. En fait, quand je délibère, les jeux sont faits 13.


Sartre présente néanmoins un argument du sens commun contre la liberté : notre impuissance :

Je nais ouvrier, français, tuberculeux. L’histoire d’une vie, quelle qu’elle soit, est l’histoire d’un échec. Le coefficient d’adversité des choses est tel qu’il faut des années de patience avant d’obtenir le plus infime résultat […] Bien plus qu’il ne paraît « se faire », l’homme semble « être fait » par le climat et la terre, la race et la classe, etc. 14.

Sartre répond que c’est par nous que surgit le coefficient d’adversité des choses. Ce rocher résiste si je veux le déplacer, mais offre une aide précieuse si je veux l’escalader pour voir le panorama : En lui-même, il est neutre, c’est-à-dire qu’il attend d’être éclairé par une fin pour se manifester comme adversaire ou comme auxiliaire 15.

Certes, il demeure un résidu incompressible qui appartient à l’en soi (ex : tel rocher sera plus ou moins propice à l’escalade), mais loin que ce résidu soit une limite à la liberté, c’est sur celui-ci qu’elle s’appuie pour s’affirmer comme liberté.


Il n’y a de liberté que dans un monde résistant 16.

C’est ce que Sartre appelle la situation : la contingence de la liberté dans le plenum d’être du monde, […] un produit commun de la contingence de l’en-soi et de la liberté, […] un phénomène ambigu, dans lequel il est impossible au pour-soi de discerner l’apport de la liberté et de l’existant brut 17.

Ce qui fait qu’ il n’y a de liberté qu’en situation et il n’y a de situation que par la liberté 18.


1 ibid., p.404
2 ibid., p.407
3 ibid.
4 ibid.
5 ibid., p.411
6 ibid., p.416
7 III, 2, p.421
8 4ème partie, p.475
9 I, 1, p.483
10 ibid, p.484
11 ibid., p.490
12 ibid., p.491
13 ibid., p.495
14 I, 2, p.527
15 ibid.
16 ibid., p.528
17 ibid., p.532-533
18 ibid., p.534