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couverture du livre Introduction à la recherche phénoménologique de Heidegger

Résumé de : L'Introduction à la recherche phénoménologique

Dans cette œuvre de jeunesse, Heidegger présente une critique de la conception husserlienne de la phénoménologie. Il s'agit d'interroger le projet phénoménologique pour lui donner une tout autre direction que celle que son fondateur, Husserl, lui assigne. Laquelle ?

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Du même auteur : Etre et Temps - Correspondance avec Karl Jaspers



Cet ouvrage reproduit le premier cours dispensé par Heidegger à l’université de Marbourg, en 1923. C’est en cette même année que Heidegger commence la rédaction d’Etre et Temps, son livre majeur.


Ce premier ouvrage contient donc des thèmes fondamentaux de Sein und Zeit, tels que le Dasein, mais ceux-ci sont encore en germe : ils n’ont pas encore été élaborés de manière explicite. Il faudra attendre quatre ans pour disposer, à la parution d'Etre et Temps, d’une détermination plus complète de leur sens.

Cette œuvre de jeunesse, l’Introduction à la recherche phénoménologique, présente néanmoins un grand intérêt, pour celui qui veut découvrir la pensée de Heidegger. Déjà on voit à l’œuvre une approche originale qui renouvelle en profondeur la manière d’aborder les problèmes philosophiques, un nouveau style d’écriture, reposant sur l’emploi d’un champ lexical encore inédit en philosophie (l’être-au-monde, l’être-à-découvert, le dévoilement, le recouvrement, le souci, l’oubli…).

Il est fascinant de voir la pensée de Heidegger se chercher, se former, dans sa jeunesse originelle, dans ce livre.


Du point de vue du contenu lui-même, ce livre expose les raisons qui amènent Heidegger à donner à la phénoménologie une tout autre orientation que celle que son fondateur, Husserl, souhaitait fixer. Il rejette tout d'abord la conception husserlienne de « la philosophie comme science rigoureuse » (du titre d’un de ses ouvrages). Il refuse également le primat de la conscience comme champ thématique spécifique de la phénoménologie, et souhaite orienter celle-ci vers un domaine plus originaire : l’homme lui-même, que Heidegger se donne la tâche de penser sous le terme de « Dasein ».

On le voit : cette Introduction à la recherche phénoménologique n’est pas l’ouvrage servile qu’un disciple pourrait rédiger pour transmettre la doctrine de son maître. Heidegger ne cherche pas ici à présenter la pensée de Husserl, en en acceptant les présupposés, mais à l’interroger de manière critique. Une critique radicale, qui met au jour les présupposés impensés de Husserl.

Il s’agit d’examiner le projet même d’une phénoménologie, ce qui nous mène à nous mettre à l’écoute d’Aristote, de Descartes, Saint Thomas, Dilthey... Un voyage intellectuel surprenant, pour celui qui s’attendait à trouver ici une simple « Introduction à la phénoménologie de Husserl ».


Sans plus tarder, découvrons ensemble ce texte…


Dans la remarque préliminaire, Heidegger précise :

Il ne faut pas s’attendre à trouver [ici] de la philosophie. Ma conviction est qu’on en a fini avec la philosophie. Nous sommes confrontés à des tâches entièrement nouvelles qui n’ont rien à voir avec la philosophie traditionnelle 1.

Dès le début de l’œuvre, Heidegger annonce donc une opposition essentielle à son vieux maître Husserl, qui entendait au contraire inscrire la phénoménologie à l’intérieur de la philosophie et constituer par là même enfin cette dernière comme « science rigoureuse ».

C’est bel et bien à la phénoménologie, et non la philosophie, que cet ouvrage est consacré, d’où son titre. Il s’agit en effet d’en revenir aux « états de faits », ces vécus de la conscience pure que l’on trouve à titre de donnée originaire et qui constituent l’objet propre de la phénoménologie : La seule chose qui compte, ce sont les états de fait.

Cette investigation permettra néanmoins de porter un nouveau regard sur la philosophie, mais de l’extérieur, pourrait-on dire.


« Phénoménologie » : ce terme n’est pas créé par Husserl à partir de rien, mais est chargé d’histoire : il conjugue le « phainomenon » et le « logos » grecs, le « φαινόμενον » et le « λόγος ».

Il s’agit de penser ce que peut signifier d’accoler l’un à l’autre ces deux termes originaires de la philosophie grecque . En réalité, en procédant ainsi, Husserl modifie la signification originelle, grecque, de ces termes, et il faut chercher comment la phénoménologie a été configurée à partir de là, jusqu’à quel point sa configuration initiale a été maintenue, jusqu’à quel point elle a été infléchie et en fin de compte abandonnée dans sa signification décisive.

On assiste donc à une sorte de détournement, non pas de fonds, mais de sens.


C’est précisément là la tâche que Heidegger se fixe dans la première partie du livre : saisir le sens originaire de la phénoménologie, en son acception première, en examinant les notions aristotéliciennes de « phainomenon » (φαινόμενον) et de « logos » (λόγος), puis le comparer à la nouvelle signification que Husserl en donne. Cela permettra de saisir à la fois la radicale nouveauté du projet husserlien, et la perte, ou l’oubli, du projet grec initial.


Maintenant que nous en savons un peu plus sur le contexte qui entoure la rédaction de l’œuvre, plongeons-nous dans cette investigation que nous propose Heidegger… Que découvre-t-on, à l’issue d’un tel cheminement ?

Auteur de l'article :

Cyril Arnaud, fondateur du site Les Philosophes
Auteur des Fragments pirates, philosophie poétique, et Axiologie 4.0, philosophie des valeurs.

1 Les références des citations sont disponibles dans l'ouvrage Heidegger : lecture suivie